Rois et Reine

 

Un film d’Arnaud Desplechin

 

Avec Emmanuelle Devos, Mathieu Amalric, Catherine Deneuve, Maurice Garrel, Jean-Paul Roussillon, Hippolyte Girardot, Noémie Lvovsky, Magalie Woch

 

 

Le nouveau film de Arnaud Desplechin, cinéaste à l’univers plutôt complexe (Esther Kahn, Comment je me suis disputé…(ma vie sexuelle)), est plus accessible que l’étaient ses œuvres précédentes et c’est tant mieux.

 

Car ce Rois et Reine (Kings and Queen) est une belle réussite de la part du réalisateur.

 

Rois et Reine, c’est l’histoire de Nora et des hommes de sa vie : son père, son ex-mari Ismaël, son fils Elias, son futur mari et le père de son fils, décédé.

 

Nora (Emmanuelle Devos) erre entre ces hommes qu’elles ne touchent pas vraiment, de ce père qui hait son égoïsme et sa monstruosité car il sait, de ce futur mari qui la laisse elle plutôt indifférente, de ce fils qu’elle ne sait si elle l’aime, de cet ex-mari artiste, brisé par la rupture, plongé dans un état de folie relative.

 

Ismaël lui est interné dans en hôpital psychiatrique, sur demande d’un tiers inconnu… Artiste incompris, généreux sans en avoir les moyens, prodigue, assisté d’un avocat accroc aux médicaments en tout genre.

 

Le père de Nora se meurt, rongé par la maladie, terminant un livre, son dernier…

 

Mis en scène avec brio, chapitré, empli de flash backs (pas toujours utiles malheureusement), Rois et Reine se déroule sous nos yeux comme l’histoire d’une évidence.

 

Tour à tour burlesque, sombre, jubilatoire ou contemplatif, Rois et Reine n’est pas lassant, il est même plutôt fascinant.

 

On s’attache aux personnages si communs qu’ils n’en sont que plus captivants.

 

Mathieu Amalric compose un personnage lunaire merveilleux, une composition qui mérite d’être reconnue tant elle apporte à l’histoire, qui glisse vers lui en délaissant Emmanuelle Devos, malheureusement peu captivante ici.

 

Emmanuelle Devos campe elle Nora. Personnage froid, inspiré notamment de personnages du cinéma comme Sharon Stone dans Casino ou la Marnie de Hitchcock, il effraie réellement au long du film. Pourtant, Emmanuelle Devos ne semble pas être faîte pour ce rôle, peu crédible en jeune fille enceinte, distante de ce rôle de femme tortueuse et sombre. Dommage…

 

Maurice Garrel campe lui le père de Nora, cet écrivain mourrant, pierre angulaire entre le passé et le présent, entre la mort et la vie, gardien des secrets de Nora, secrets qu’elle étouffera même après sa mort.

 

A leurs côtés on retrouve des seconds rôles attachants, Hippolyte Girardot en avocat accroc aux médicaments, Catherine Deneuve en médecin, Magalie Woch en «chinoise » suicidaire, Noémie Lvosky en sœur protégeant son héritage…

 

Pour beaucoup le meilleur film français de l’année 2004. Sans aller jusque là, Rois et Reine est une œuvre forte qui laisse entrevoir le cinéma de Desplechin sous un angle nouveau, plus abordable qu’il n’était.

 

A voir, car ce genre d’œuvre est rare dans le cinéma français,

 

Arnaud Meunier

02/01/2005