Tsotsi

 

Un film de Gavin  Hood

 

D’après l’œuvre de Athol Fugard

 

Avec Presley Chweneyagae, Motushi Magano, Zenzo Ngqobe, Thembi Nyandeni, Zola…

 

 

Tsotsi, auréolé de l’Oscar du meilleur film étranger cette année, arrive enfin sur les écrans français avec une avalanche de critiques dithyrambiques.

 

Et autant dire que ces éloges ne sont pas usurpées tant Tsotsi marque les esprits par sa violence et son intense émotion.

 

Tsotsi est un mot qui désigne un voyou, un gangster en Afrique du Sud. C’est aussi le nom que s’est donné un jeune garçon qui survit dans le township de Soweto, où avec ses amis il vole, violemment, dans la démesure.

 

Une terreur qui s’est forgé une carapace que rien ne semble pouvoir briser. Et pourtant, alors qu’il vient de voler une voiture et tirer sur une femme, il se retrouve avec un bébé volé et la police après lui. 6 jours dans la vie de Tsotsi qui vont peut-être le faire changer, ou bien l’emmener encore plus loin.

 

Adapté de l’œuvre d’Athol Fugard

, publiée en 1980, Tsotsi paraît pourtant comme extrêmement contemporain, par sa peinture sans concession et réaliste de Soweto et de la survie des street kids, abandonnés par leurs parents, souvent orphelins à cause du Sida ou de la violence quotidienne.

 

Sombre et violent, Tsotsi révèle pourtant de magnifiques lueurs d’espoirs, qui ne laissent indifférent dans un milieu souvent hostile et qui semble ne jamais voir le moindre espoir se concrétiser.

 

A la manière de La Cité de Dieu, de Fernando Meirelles, Tsotsi montre une réalité parfois dure à accepter et à comprendre, celles des enfants, isolés et livrés à eux-mêmes, à leur survie, parfois précaire. La mort est quotidienne, et malgré tout, les enfants survivent et continuent de vivre, sans regarder en arrière.

 

Gavin Hood saisit avec brio la bipolarité de cette Afrique du Sud, à la fois moderne et ambitieuse, toujours très afrikaan, et toujours tristement pauvre, comme un mal nécessaire à un pays ravagé par l’apartheid, créateur des townships, véritables villes où l’ordre est celui de la force, de la violence, mais où il règne pourtant une solidarité humaine qui en permet la survie.

 

Pour interpréter le rôle titre, celui de Tsotsi, le cinéaste a choisi un jeune homme né à Soweto, qui dégage une force impressionnante, par le regard dur qui en fait un leader, un caïd, mais qui, derrière cette façade malheureusement trop réaliste, laisse apparaître sa vraie personnalité, celle d’un enfant trop tôt arraché à l’innocence et projeté dans un monde où seule la loi du plus fort prévaut.

Il s’émerveille de l’innocence d’un bébé dans lequel il projette sa propre vie, rêvant de pouvoir lui donner un amour de la vie que lui semble avoir oublié. C’est une errance perpétuelle, où seule la mort semble être l’issue.

 

Tsotsi vit dans l’urgence, constamment en sursis comme ses amis. Un instant et tout est fini. Reste l’espoir, l’espoir de voir Tsotsi survivre, grandir et vivre.

 

Le casting est impressionnant, les jeunes comédiens sont épatants de naturel et illuminent l’écran.

 

La musique, signée de Zola principalement, est du kwaito, un mélange de house, musique traditionnelle et hip-hop. Celle-ci, dès le générique de début, fait baigner le film dans une atmosphère à la fois très traditionnelle et parfaitement adaptée à Soweto, mais également dans une atmosphère dissonante, accentuant un peu plus la difficulté de ce monde qui veut avancer, devenir et vivre.

 

Tsotsi est une œuvre puissante et dure, sombre et pourtant qui touche par son émotion et laisse espoir exister.

 

A voir absolument à sa sortie.

 

Arnaud Meunier

18/06/2006