The
Science of Sleep
Un film de Michel Gondry
Avec Gael Garcia Bernal, Charlotte Gainsbourg, Alain Chabat, Miou-Miou, Emma de Caunes…
Si l’est un cinéaste que l’on rêvait de voir tourner en France, il s’agit bien du français Michel Gondry, exilé artistiquement outre-Atlantique pour le bonheur du monde cinématographique et musical étranger.
Après avoir été réalisateur de clips, pour Björk, Radiohead, The White Stripes…, de pubs (Levis, Air France…), Michel Gondry s’est tourné vers le grand écran logiquement, imposant au fil de ses œuvres son univers poétique, décalé, magique.
Human Nature, Eternal Sunshine of the Spotless Mind marquaient déjà l’empreinte de Gondry au cinéma, un art à la Méliès qui ne cesse de puiser dans l’inventivité, la créativité pour exister et faire rêver.
Avec ce nouveau film, Michel Gondry « lâche les chevaux » et repousse les limites de l’imaginaire.
L’intrigue est simple : Stéphane Miroux revient en France après avoir vécu auprès de son père au Mexique, habitant chez sa mère et ayant un job dans une petite société de calendriers. Mais Stéphane a un problème : il rêve beaucoup, voire trop, et en vient à confondre réalité et rêve, à ne plus savoir ce qu’il fait ou ne fait pas.
Il croise alors sa voisine, Stéphanie, jeune demoiselle célibataire qui elle aussi vit en marge, dans un monde empreint de poésie et de douce folie.
Mais entre ses collègues complètement cinglés, son travail inintéressant et cette proximité locative perturbante, les rêves de Stéphane s’agitent.
Si vous n’avez jamais vu de clip réalisé par Michel Gondry, le visuel de The Science of Sleep ne vous laissera pas indifférent. Eblouissant d’ingéniosité et de créativité, chaque plan est un hommage à Méliès, au cinéma d’animation, une ode à la création.
Pour les autres, poussés sans doute par le nom de Gondry à vous rendre dans les salles obscures, vous y trouverez son univers, qui après s’être limité à quelques minutes de clips et une œuvre poétique splendide, prend ici toute son ampleur, sa grandeur, sa splendeur.
Tel un enfant, Gondry nous dévoile ses trésors visuels, ses créations toujours plus folles, un cinéma fait de bric et de broc autour duquel s’articule une intrigue à la fois drôle et tendre où les comédiens prennent visiblement un plaisir immense.
Gale Garcia Bernal joue en trois langues, dont le français, et excelle dans le rôle du jeune homme vivant dans ses rêves. Charlotte Gainsbourg est touchante, et prouve, s’il en est encore besoin, qu’elle peut jouer dans des registres de comédie très divers. Alain Chabat quant à lui est surexcité, comme un enfant à qui l’on donne enfin un jouet à la hauteur de ses espérances.
Les dialogues sont drôles et libres, comme l’air agréable et frais qui souffle sur ce film. On retrouve par moments quelques plans, détails qui nous rappellent les clips de Radiohead, Bjork ou Daft Punk. Gondry mélange les genres avec subtilité, de l’animation à la comédie pure, de l’émotion à la démence.
Eternal Sunshine of the Spotless Mind marquait la collaboration de deux génies des temps modernes, Charlie Kaufman et Michel Gondry. Ici, Gondry est en solo, et le brio de The Science of Sleep nous laisse espérer de beaux jours pour le cinéma, et pour le cinéaste.
S’il ne s’agit pas de l’œuvre de la maturité pour le cinéaste, éternel enfant qui n’en finit de nous émerveiller, The Science of Sleep marque un grand pas en avant pour lui.
Le risque du ratage en passant du format très court de ses fantaisies au long métrage existait, mais Gondry, au-delà d’avoir fait exister son univers sur grand écran, a prouvé, s’il fallait encore le faire, que sa créativité et son génie visuel pouvait évoluer en harmonie avec une histoire d’amour ou une histoire de rêves et de cheval…
Pour voyager et rêver, rire et s’émerveiller, ne manquez pas The Science of Sleep.
Arnaud Meunier
24/08/2006