Quand j’étais chanteur

 

Un film de Xavier Giannoli

 

Avec Gérard Depardieu, Cécile de France, Mathieu Amalric

 

Après avoir exploré les souffrances de la jeunesse, de la post-adolescence avec Les Corps Impatients et Une Aventure, le jeune cinéaste change de registre en racontant l’histoire d’Alain Moreau, chanteur de bal musette, dans la campagne auvergnate.

 

Chanteur, séducteur, sensible et mélancolique, Alain chante la « roucoule » comme il le dit lui-même. Chanteur populaire, qui égrène les airs de la chanson française pour les couples dansent, que les gens s’effleurent et se rencontrent.

 

Présenté à Cannes cette année en compétition officielle, Quand j’étais chanteur a bien failli repartir avec le prix de la meilleure interprétation masculine, pour Gérard Depardieu évidemment. Le comédien, après plusieurs années de films anecdotiques, des rôles oubliés et sans envergure, livre ici une performance magnifique, profondément sensible. Une interprétation élégante, aérienne, sensible et habitée, éblouissante. Cela faisait longtemps que le comédien ne nous avait pas donné des frissons comme cela. Son regard, sa présence, parfait contrepoids de la sensibilité et de la féminité de Cécile de France, traversent Quand j’étais chanteur sans fausse note.

 

On peut voir ce rôle comme le miroir de la vie de Depardieu, un héros fatigué qui se cherche un destin, un amour, une rédemption peut être avec des années d’extravagance théâtrale et d’excès.

 

Mais Giannoli raconte aussi une histoire d’amour, entre deux êtres abîmés par la vie, une rencontre improbable entre une jeune agent immobilier et ce chanteur de bal, qu’elle trouve à la fois lourd mais touchant. Puisant beaucoup dans le répertoire de la chanson française, de Michel Delpech à Christophe, parfois un peu trop, le réalisateur réussit à donner un cachet de sensibilité indéniable à cette romance qui ne se découvre que très tard, de ce duo amoureux qui ne semble pas pouvoir exister, malgré la complicité qui règne.

 

Cécile de France a su exister face à Gérard Depardieu, un défi difficile qu’elle a pourtant relevé haut la main. Un duo harmonieux, remarquable, qui a su s’équilibrer naturellement à travers le jeu.

 

Une fois de plus, Giannoli capte les sentiments et les souffrances, cette fois-ci plus adultes et moins passionnés, mais avec autant de justesse. Comme un vieux lion, Alain renaît de ses cendres avec ironie et émotion, livrant ainsi son bal à lui.

 

Un Depardieu retrouvé, une Cécile de France enfin adulte et féminine, une comédie dramatique sensible et juste, rien à redire pour ce troisième long métrage de Xavier Giannoli, qui continue discrètement son chemin dans le paysage cinématographique français avec brio.

 

Pour se laisser entraîner…

 

Arnaud Meunier

23/09/2006